Résumé de l'article de Catherine REPUSSARD
Pour lessentiel, il ne sagit pas, dans cet article, de revenir sur la question de lexpropriation des Doualas du Cameroun par les autorités allemandes durant la période coloniale (1884-1918) en vue de construire « une ville blanche et saine » en Afrique de lOuest qui a fait lobjet dun certain nombre de travaux. Il sinscrit bien davantage dans le sillage des théories postcoloniales et aborde la question par le biais de son ancrage dans les représentations de soi et de lautre, dans celle du rejet de lautre et de laffirmation de soi au miroir de lautre, à travers lanalyse dune véritable « distorsion postcoloniale », afin de souligner le caractère inopérant de toute approche « binariste » en la matière. L « hégémonie intriquée » entre vision coloniale et attitude « compradore » de la part de lélite douala au moment de la tentative dexpropriation remet en question les obsessions, les peurs et des craintes suscitées par une altérité non maîtrisée, incarnée par des indigènes qui, parce quils ne correspondaient plus en rien à ce que lon tenait pour des « peuples naturels » (Naturvölker), mettaient à mal les représentations et les certitudes des colons, « irritant » ainsi les frontières conceptuelles européennes pour sépanouir au sein despaces liminaux générées par lart de limitation que le théoricien postcolonial Homi Bhabha désigne par le terme de mimicry. Lors de cet épisode colonial, lart de ladaptation aux règles élaborées par le colonisateur prendra des formes particulières, les Doualas devenant les promoteurs de leur propre « primitivité » allant jusquà inventer une tradition indigène, afin de faire valoir leurs droits ou tout du moins de valoriser leur position aux yeux de certains groupes politiques réactionnaires comme celui des Vöklisch.